La vie après une Greffe du Foie

Page mise à jour le 12/09/2014

Après un temps plus ou moins long de souffrances physiques et psychiques, de traumatismes sociaux et corporels, voici venu le temps de l’Homme nouveau : « Mens sana, in corpore sano », « Un esprit sain, dans un corps sain » tel pourrait être l’adage des patients transplantés.

La transplantation hépatique est une lourde intervention. La récupération des patients est directement liée à leur état général, psychique et physique, avant la greffe : plus le patient arrive à la transplantation hépatique dans un état général altéré, plus la récupération est longue et difficile. Cependant, sans pouvoir faire de généralité, il est raisonnable d’espérer au bout de 6 mois unerécupération totale, physique et psychique. Bien entendu, cette récupération est d’autant plus rapide, que les patients respectent des règles d’hygiène de vie sans faille.

Plusieurs thèmes du quotidien sont abordés ci-après mais les indications données ici sont très générales : n’hésitez pas à demander aux professionnels de santé, en particulier votre médecin référent et/ou votre infirmier de coordination de transplantation référent, des informations complémentaires sur les sujets de votre choix.

Alimentation

D’un point de vue alimentaire, les règles sont assez strictes au début de la transplantation: régime sans sel, sans sucre, sans graisse, sans fibres … à adapter en fonction de chaque personne, de ses besoins, de la distance vis-à-vis de la greffe, et de son traitement immunosuppresseur. Ces restrictions sont amenées à disparaître petit à petit, jusqu’à aboutir à un régime strictement normal. Seuls les fruits de mer restent généralement contre-indiqués, et plus généralement tout ce qui vient de la mer et qui n’est pas cuit.

Il est fondamental de rappeler ici que le pamplemousse est strictement interdit. Il a un effet catalyseur sur l’absorption des immunosuppresseurs comme la Ciclosporine ou le Tacrolimus. Il peut donc potentiellement augmenter les effets secondaires de manière importante, et leur néphrotoxicité. Donc Pamplemousse = Danger.

Bien entendu les boissons alcoolisées sont à proscrire de ce régime, et ce, à vie.

Se forcer à prendre de bonnes habitudes dès le début vis-à-vis d’une alimentation équilibrée devrait leur permettre de devenir naturelles. Avec le temps, on voit s’estomper certaines difficultés, il devient naturel de préférer certains aliments aux profits d’autres, moins diététiques.

Plantes et Animaux

Après la transplantation hépatique, les doses d’immunosuppresseurs sont importantes et les défenses immunitaires sont au plus bas. Il convient donc de prendre quelques précautions en ce qui concerne les animaux, les plantes, ainsi que dans les endroits surpeuplés et confinés, comme les moyens de transport publics. Bien sûr ces précautions sont temporaires, la prudence est surtout nécessaire les six premiers mois. Plus les patients s’éloignent de la transplantation plus les défenses immunitaires vont remonter.

Pour les animaux, il convient de connaître son statut sérologique, afin d’éviter la déclaration de maladie, comme par exemple la Toxoplasmose, véhiculée par les chats. De plus il est fondamental de bien se laver les mains après avoir caressé son animal de compagnie, surtout si cet animal a accès à l’extérieur. Éventuellement le port de gants et de masque peut être recommandés lors de la réfection des litières par exemple. Quant aux bisous sur la bouche … INTERDITS !

Pour le jardinage, il est conseillé de porter un masque, surtout si on doit remuer de la terre, et plus encore si cette terre est sèche. Attention aux coupures, piqûres, et autres plaies qui peuvent survenir au décours de cette activité. Lavage des mains obligatoire au retour à la maison !

Sport

Les activités sportives sont fortement conseillées mais elles doivent être adaptées à l’état des patients. Elles sont indispensables pour retrouver confiance dans son corps, meurtri par la maladie et l’intervention chirurgicale, et ainsi aider au rétablissement de l’image de soi.

La marche est particulièrement recommandée dans les premiers mois après la transplantation. Puis les efforts physiques, s’ils doivent être contrôlés, peuvent devenir plus actifs.

Le sport en compétition doit être strictement encadré par une équipe médicale.

Les sports violents, de contact, sont à proscrire pour éviter tout risque de contusion sur le greffon.

Sexualité

En ce qui concerne la sexualité, il faut différencier les problèmes qui existaient déjà avant la greffe, de ceux qui peuvent apparaître après la greffe. Une deuxième différenciation est importante : les problèmes sexuels dits « organiques », de ceux dits « psychiques ». La notion de plaisir n’est pas toujours aisée à retrouver, l’estime de soi ou l’image de soi non plus. La manière de les aborder, et de tenter de les résoudre, n’est pas la même.

Quoi qu’il en soit, il ne faut pas hésiter à en parler aux professionnels de santé pour qu’ils puissent éventuellement vous orienter vers un spécialiste compétent, un urologue par exemple.

La sexualité fait partie intégrante de la qualité de vie, il convient de ne pas minimiser ou de cacher un éventuel problème. Les difficultés sexuelles provoquées par la cirrhose, sont censées disparaître avec la greffe. Si des problèmes subsistent, quelle qu’en soit l’origine, des solutions existent pour tenter de retrouver une libido satisfaisante et une vie sexuelle épanouie.

Grossesse

Après la greffe, une grossesse est possible. Bien entendu elle nécessite une surveillance accrue par des équipes pluridisciplinaires, compétentes dans les deux domaines de la Transplantation et de l’Obstétrique. La communauté médicale recommande actuellement d’attendre une année après la transplantation avant d’envisager une grossesse.

Une adaptation du traitement immunosuppresseur est parfois nécessaire, certains d’entre eux ayant des effets tératogènes.

Le risque de pré-éclampsie, voire d’éclampsie, est augmenté chez une femme transplantée, surtout chez les greffées du rein. Ce risque peut être mortel pour la femme et le fœtus : le suivi est donc « vital», avec la surveillance de certains paramètres comme la tension artérielle et la protéinurie.

Enfin l’allaitement est proscrit, car certaines molécules du traitement de la mère se retrouvent dans le lait maternel.

Il n’existe pas de registre spécifique des grossesses chez les patientes transplantées, mais elles sont de plus en plus nombreuses.

Voyages

Les voyages ont également une place de choix dans le retour à une vie « normale ». Par contre, ces voyages se préparent, surtout s’ils ont lieu à l’étranger. Une visite auprès d’un médecin spécialisé dans la « Médecine des voyages et des vaccinations internationales » est indispensable. Il pourra être amené à vous interdire certaines régions en fonction de l’évolution des épidémies et des saisons, et bien entendu, de vos vaccinations. En effet, toutes les vaccinations à « Virus Vivant », comme celle contre la Fièvre Jaune, seront interdites après la transplantation. En fonction de votre statut sérologique, l’accès à certains pays pourra vous être interdit. Il convient donc éventuellement, si votre médecin vous en donne l’autorisation, de penser à vous vacciner avant la greffe.

Il faut penser à partir avec une réserve de médicaments suffisante pour ne pas risquer une rupture du traitement immunosuppresseur, et garder cette réserve avec vous (éviter de la mettre dans la soute de l’avion par exemple).

Vous devez également vous équiper de protections solaires : les immunosuppresseurs vous rendent photosensible, et augmentent donc le risque de cancer cutané.

Enfin, prendre une assurance « rapatriement sanitaire » semble être une sage décision.

Ces précautions prises, ainsi que des recommandations générales sur l’eau, les légumes, la viande, et le lavage des mains bien sûr, en fonction des pays visités, à vous la découverte du monde ! 

Surveillance

Greffé, vous pouvez prétendre à une vie « normale : hormis certaines contraintes qu’il faut savoir accepter, comme le respect d’une certaine hygiène de vie, et une compliance véritable à la prise de votre traitement alors cela devrait être possible. Bien sûr, il ne faut pas être trop pressé d’atteindre cette « normalité ». Il faut « laisser du temps au temps », de manière à récupérer une énergie vitale, qui avait plus ou moins disparu. Certains proverbes prennent ici tout leur sens : « prudence est mère de sûreté », « rien ne sert de courir, il faut partir à point », ou bien encore « mieux vaut prévenir que guérir ».

Certes il faut tenter « d’oublier que l’on est transplanté » pour vivre … ou plutôt tenter de l’accepter, de comprendre les tenants et les aboutissants d’un tel état, de manière à minimiser le ressenti contraignant des différentes visites médicales indispensables. Les traitements immunosuppresseurs seront à prendre à vie. Même si l’équipe médicale s’efforcera d’en réduire les doses au minimum à distance de la greffe, ils ont des effets secondaires à long terme : problèmes cardio-vasculaires, risque accru de cancer, ou bien encore risque d’insuffisance rénale. Il est donc fondamental d’avoir un suivi régulier de manière à prévenir ces problèmes qui peuvent être majeurs.

À ce jour, la population des transplantés hépatiques compte dans ses rangs de nombreux « anciens », qui ont vingt ans de transplantation et plus. Un suivi intelligent, couplé à l’expérience grandissante des équipes médicales, devrait permettre de pérenniser et de prolonger une telle longévité, et d’améliorer encore leur qualité de vie.