Cancer de la vésicule biliaire

Page mise à jour le 10/12/2018
Auteur : 
Dr. Oriana Ciacio, Chirurgienne

Epidémiologie du Cancer de la vésicule biliaire

Le cancer de la vésicule biliaire est le cancer le plus fréquent parmi les cancers des voies biliaires, et le 6ème cancer digestif en France.

Ce cancer présente de fortes disparités géographiques. L’Asie, l’Amérique du Sud et l’Europe de l’Est sont des zones endémiques avec une incidence élevée. L’Europe occidentale a en revanche une incidence faible, inférieure à 5 cas pour 100 000 habitants.

Le cancer de la vésicule biliaire est plus fréquent chez les patients âgés de plus de 65 ans et chez la femme avec un rapport femme/homme qui varie de 1 à 5 selon les régions. L’écart femme - homme a tendance à être plus fort dans les zones endémiques et plus faible dans les zones à basse incidence : en France on compte environ 3,3 femmes atteintes pour 1 homme.

Facteurs de risque 

Les facteurs de risque du cancer de la vésicule biliaire sont les causes d’inflammation biliaire chronique. Parmi ces causes, on trouve :

  • la lithiase biliaire symptomatique (des lésions de cholécystite chronique sont retrouvées dans plus de 75% des cancers de la vésicule),

  • les anomalies de la jonction bilio-pancréatique,

  • le portage chronique d’une infection de la vésicule biliaire par Salmonella Typhi et Paratyphi

  • et la cholangite sclérosante primitive.

Les polypes intra-vésiculaires et les calcifications de la muqueuse de la vésicule biliaire sont également des facteurs de risque de cancers de la vésicule biliaire.

Compte tenu du haut risque de cancer que certains facteurs de risque comportent, une cholécystectomie prophylactique (préventive) est indiquée en cas de :

  • polype intra-vésiculaire d'une taille supérieure à 1 cm, ou augmentation en taille d’un polype au cours du suivi

  • anomalies de la jonction bilio-pancréatique, ou

  • calcifications isolées de la muqueuse de la vésicule biliaire.

Une cholécystectomie prophylactique n’est en revanche pas indiquée en cas de lithiase biliaire de découverte fortuite et non symptomatique.

Diagnostic du cancer de la vésicule biliaire

Dans la moitié des cas, le cancer de la vésicule biliaire est découvert de façon fortuite suite à une cholécystectomie réalisée pour une lithiase biliaire symptomatique. On découvre actuellement un cancer de la vésicule biliaire dans à 0.2 à 2.9% des cholécystectomies réalisées.

Dans l’autre moitié des patients, ce cancer est découvert suite à la présence de symptômes cliniques : on parle alors de cancer symptomatique.

Cancer de la vésicule biliaire de découverte fortuite

La découverte du cancer peut avoir lieu pendant l’intervention de cholecystectomie (dans ¼ des cas), mais le plus souvent, ce diagnostic n'est connu qu'après l'opération, à l'occasion de l’analyse histologique de la vésicule enlevée.

Que faut-il faire en cas de découverte d’un cancer de la vésicule biliaire après l’intervention de cholécystectomie ?

Dans 3/4 des cas le diagnostic de cancer n’est réalisé qu’au moment de l’analyse histologique.

Il faut tout d’abord identifier les patients qui nécessitent une re-intervention à visée carcinologique.

  • Pour les tumeurs In Situ et T1a (qui n’atteignent pas la musculeuse de la paroi vésiculaire), réséquées de façon complète avec des marges saines, il n’est pas nécessaire d’envisager une re-intervention et la survie de ces patients est de quasiment 100% à 5 ans.

  • En revanche, en cas de résection incomplète et/ou pour tous les cancers à partir du stade T1b (atteinte de la musculeuse de la paroi de la vésicule) il est nécessaire re-intervenir. Dans ces cas le risque de récidive de la maladie est en effet haut en absence de ré intervention. Une stratégie oncologique en deux temps, c'est-à-dire la cholécystectomie initialement puis le traitement carcinologique dans un centre expert dans un deuxième temps, ne modifie pas le pronostic du patient par rapport à une chirurgie carcinologique d’emblée.

Pour les patients qui nécessitent une re-intervention, un bilan d’extension de la maladie est réalisé avant de re-intervenir. Ce bilan d’extension comporte en général un scanner thoraco-abdomino-pelvien, un bilan sanguin et un dosage des marqueurs tumoraux (ACE et CA19.9). Il est également nécessaire de réunir tous les renseignements concernant le déroulement de la première intervention.

Quel type de re-intervention ?

La re-intervention consiste à réséquer partiellement ou entièrement les segments 4 et 5 du foie, c’est-à-dire les parties du foie les plus proches de la vésicule biliaire. Cette résection est accompagnée d’un curage ganglionnaire et peut être parfois associée à la résection de la voie biliaire et/ou à la résection des orifices des trocarts.

Au moment de la re-intervention, une maladie résiduelle est retrouvée dans 50% des patients environ et dans 5% des cas cette maladie résiduelle contre-indique la réalisation d’un geste curatif. La maladie résiduelle est plus fréquemment localisée au niveau foie ou des ganglions du pédicule hépatique.

Quel pronostic ?

Tous stades confondus, le cancer de la vésicule biliaire découvert fortuitement après une cholécystectomie a un meilleur pronostic qu'un cancer symptomatique de la vésicule biliaire. Ses facteurs pronostiques sont :

  • le stade TNM de la tumeur,
  • la présence de métastases ganglionnaires,
  • le fait de trouver une maladie résiduelle au moment de la re-intervention
  • et la possibilité de réaliser une résection complète de la tumeur avec des marges saines.

Cancer de la vésicule biliaire symptomatique

Tableau clinique 

Les symptômes du cancer de la vésicule biliaire apparaissent généralement de manière tardive à un stade avancé de la maladie. Les symptômes les plus fréquents au moment du diagnostic sont la douleur abdominale et l’ictère respectivement dans 40% et 25% des patients. D’autres symptômes possibles sont la découverte d’une masse abdominale palpable et la perte de poids.

Les signes biologiques

L'ACE (antigène carcino-embryonnaire) et/ou le CA 19.9 (Carbohydrate Antigen 19.9) sont les deux marqueurs de cette tumeur. Ce sont les mêmes marqueurs que ceux du cancer du côlon et des adénocarcinomes en général (pancréas, estomac et l'intestin grêle).

Une cholestase et/ou un ictère, conséquence d’une obstruction biliaire, peuvent être présents sur le bilan biologique (augmentation du taux sanguin de Gamma-GT et/ou de bilirubine totale).

Les signes radiologiques

Le cancer de la vésicule biliaire peut être responsable de métastases intra-hépatiques ou pulmonaires, d’un envahissement des vaisseaux du foie (veine porte et artère hépatique) ou de l'apparition de ganglions métastatiques au niveau du pédicule hépatique ou à distance. Au cours du bilan d’extension de la maladie, l’ensemble de ces éléments sont vérifiés afin de décider si un traitement chirurgical est possible.

Les examens morphologiques effectués pour le diagnostic de la tumeur et l'évaluation de son extension sont le plus souvent l'échographie, le scanner sans et avec injection de produit de contraste, l’IRM hépatique et cholangio-IRM, et rarement le PET-Scan (ou scintigraphie au 19FDG).

L’échographie abdominale est souvent le premier examen réalisé et permet d’affirmer le diagnostic de lésion tumorale au départ de la vésicule biliaire.

Le scanner avec injection de produit de contraste permet de déterminer la localisation précise du cancer, son extension vasculaire (veine porte et artère hépatique) et ganglionnaire. La réalisation d’un scanner thoraco-abdomino-pelvien est également nécessaire pour exclure la présence de métastases à distance (pulmonaires ou hépatiques) et pour calculer le volume de foie en cas d’hépatectomie majeure programmée.

L’IRM hépatique peut être utile pour caractériser des éventuelles lésions intra-hépatiques ; l’intérêt de la cholangio-IRM est réservé aux cas de suspicion d’envahissement de la voie biliaire principale.

Un PET-scan peut être réalisé en cas de lésions suspectes à distance.

 

Traitement du cancer de la vésicule biliaire

Le traitement du cancer de la vésicule biliaire est indispensable sous peine d'une évolution toujours fatale. Le seul traitement curatif est la résection chirurgicale complète du cancer. Les contre-indications à une prise en charge chirurgicale sont les métastases hépatiques ou à distance, l’envahissement de l’artère hépatique ou du pédicule hépatique et les adénopathies métastatiques en dehors du pédicule hépatique. La chimiothérapie préopératoire n'a pas lieu d'être si la tumeur est résécable. Après l'intervention chirurgicale, une chimiothérapie est souvent proposée.

La chirurgie

Le traitement de référence du cancer de la vésicule biliaire est la résection chirurgicale avec des marges de résection saines d’au moins 1 cm. L’intervention de référence est la cholécystectomie radicale qui consiste à réséquer la vésicule biliaire et les segments 4 et 5 du foie (la partie du foie autour de la vésicule biliaire) ainsi que les ganglions du pédicule hépatique et cœliaques.

En cas de grosse tumeur ou d’envahissement vasculaire, il est parfois nécessaire envisager une résection hépatique plus importante (par exemple une hépatectomie droite élargie ou gauche élargie). Dans les cas d’hépatectomie élargie, il peut être nécessaire avant l’intervention d’induire la régénération de l’hémifoie restant par une embolisation portale de l'hémifoie à retirer. La résection du cancer a lieu 1 mois après l'embolisation portale, après qu'un nouveau scanner ait confirmé que la chirurgie prévue est faisable en laissant un volume de foie résiduel d'au moins 0.6% du poids corporel.

En cas de suspicion de maladie métastatique ou non résécable, l’intervention commence par une cœlioscopie afin d’explorer la cavité abdominale.

Une résection de la voie biliaire principale peut également être nécessaire s’il existe un envahissement de celle-ci par la tumeur.

Cancer de la vésicule biliaire avec ictère

Un ictère est présent au moment du diagnostic dans environ 1/3 des cancers de la vésicule biliaire : il est lié à un envahissement de la voie biliaire principale par la tumeur dans la majorité des cas. L’ictère est souvent un indice de maladie avancée et il représente donc un facteur pronostic péjoratif. Dans la majorité des cas, un traitement chirurgical est impossible. Le traitement de référence est dans ce cas le drainage biliaire et la chimiothérapie.

Le drainage biliaire est effectué de préférence par voie endoscopique : il a pour but de faire disparaître l’ictère, afin de pouvoir débuter la chimiothérapie.

Dans certains cas, une intervention peut être envisagée malgré l’ictère. La prise en charge chirurgicale du cancer de la vésicule biliaire avec ictère doit être réalisée dans des centres experts comme le nôtre : il s’agit en effet d’une chirurgie hépatique majeure avec reconstruction biliaire et/ou vasculaires associées et nécessitant une préparation préopératoire par embolisation portale, drainage biliaire et renutrition.

La chimiothérapie intra-veineuse et la radiothérapie

Cancer de la vésicule biliaire résécable

En cas de tumeur résécable, il n’est pas indiqué d'effectuer une chimiothérapie pré-opératoire : le traitement de référence est le traitement chirurgical d’emblée.

Après la chirurgie, une chimiothérapie de type GEMOX ou un protocole de radiothérapie 45Gy + chimiothérapie 5FU peuvent être proposés s'il existe des signes de mauvais pronostic sur la pièce de résection (grosse tumeur, envahissement vasculaire, envahissement ganglionnaire, marges de résection chirurgicale envahies).

Cancer de la vésicule biliaire non résécable

En cas de tumeur non résécable d'emblée (tumeurs localement avancées ou métastatiques), une chimiothérapie de type GEMOX peut-être proposée afin de diminuer la vitesse de progression de la maladie. Exceptionnellement, la chimiothérapie en diminuant le volume tumoral peut permettre secondairement une intervention.